Au-delà des mots : Une compréhension de L’Amour et la Folie de La Fontaine

Carly Roberts

La Fontaine est un fabuliste célèbre du 17ème siècle. Il est bien connu pour ses fables, comme La Cigale et la Fourmi, et dans chaque fable, il met une moralité à l’histoire, typiquement au début ou à la fin de la fable. Donc, on peut facilement trouver ces moralités dans la fable, mais que se passe-t-il quand La Fontaine ne suit pas sa façon ? Dans cet article, nous recherchons la moralité et les raisons pour lesquelles il s’éloigne de son style habituel avec L’Amour et la Folie en comparant les moralités entrelacées dans ses autres œuvres et lisant entre les lignes pour découvrir la force motrice derrière L’Amour et la Folie.

Dans la plupart des œuvres de la Fontaine, on trouve que les personnages sont des animaux qui nous enseignent une leçon. Alors que de l’extérieur, on pourrait penser qu’il utilise les animaux pour rendre ses œuvres plus faciles à aborder et plus faciles à comprendre. Les animaux sont également capables de représenter les qualités et les émotions humaines. La Fontaine explique brièvement dans son livre Fables pourquoi l’utilisation des animaux est importante dans ses œuvres. Il a écrit que « Ce ne sont pas choses de peu d’importance que ces sujets : les animaux sont les précepteurs des hommes dans mon ouvrage » (La Fontaine 345). Les hommes par nature apprennent grâce à l’enseignements des autres. Ben Rejeb résume cette idée dans son article « Les Fables de La Fontaine. Rhétorique de la Prédication » (1668)en nous disant que « La convention même de la fable, son statut dans le cadre de l’interlocution est de parler du monde animal pour signifier le monde des hommes » (Rejeb 7).

Nous pouvons retracer l’utilisation des animaux pour cette raison jusqu’aux anciens Grecs avec les fables d’Ésope. Il est clair que La Fontaine a été inspiré par Ésope. L’article « La Vie d’Ésope le Phrygien de La Fontaine, ou les ruses de la vérité » (1979) écrit par Marie-Christine Bellosta a discuté ça, mais elle souligne la différence entre les deux fabulistes. Contrairement à Ésope, elle écrit que « La Fontaine a effacé toutes ces moralités partielles, mais sans pour autant tirer de son récit édifiant une leçon générale » (Bellosta 6). Donc, La Fontaine utilise les animaux pour nous enseigner clairement la moralité de ses fables.

Dans chacune de ses fables, ces animaux nous apprennent une leçon, qui pousse toute la fable. Mais même si La Fontaine déclare clairement sa moralité dans ses fables, nous devons souvent comprendre la fable même après avoir vu la moralité écrite. Les qualités humaines qu’il donne aux animaux dans ses fables permettent au lecteur de voir un reflet d’eux-mêmes. Nous avons utilisé des animaux pour faire ça depuis le début de l’humanité. Dans l’article « Analogie et Cohérence Textuelle. Cas de l’Analogie Animale dans Les Fables de La Fontaine » (2019) par Rim Ben Yacoub, nous dit que :

Aussi vieille que la cohabitation de l’homme et de l’animal dans cet univers, l’analogie animale a toujours était présente dans la pensée humaine. Tout d’abord, c’est avec les fresques des grottes préhistoriques que l’homme a commencé à user de l’analogie avec l’animal pour décrire son mode de vie, ses activités, ses peurs et ses craintes. (Yacoub 170)

C’est cette histoire qui raconte la narration traditionnelle des animaux que nous voyons encore utilisés. Pourtant, il y a une fable qui n’utilise aucun animal, c’est L’Amour et La Folie. Cette fable raconte de l’histoire de l’amour et de la folie, mais il les caractérise comme des humains.

Pour résumer la fable, autrefois, l’amour et la folie jouaient ensemble jusqu’à une telle querelle que même les dieux étaient choqués et la folie aveugle l’amour. Parce que le crime était si sérieux, même Vénus a exigé que la folie soit punie. La cour suprême a décidé que la folie devrait servir de guide à l’amour pour le reste de la vie. Alors La Fontaine abandonne les animaux pour les dieux. Si les animaux sont les précepteurs pour les hommes, nous devons nous demander ce que sont les dieux.

Pour commencer, regarderons la morale de la fable. Nous trouvons la moralité dans les premiers vers comme dans beaucoup des autres fables :

Tout est mystère dans l’amour,

Ses flèches, son carquois, son flambeau, son enfance.

Ce n’est pas l’ouvrage d’un jour

Que d’épuiser cette science.  (La Fontaine vers 1 à 5)

Dans cette fable, La Fontaine crée une histoire pour expliquer pourquoi nous disons que l’amour est aveugle et apparaît souvent mystérieux dans son fonctionnement.  La moralité de cette fable semble simplement nous rappeler que l’amour est mystérieux, alors nous devons chercher plus profondément pour trouver ce que La Fontaine essaie de nous apprendre.

L’histoire dans la fable commence quand il nous dit que « La Folie et l’Amour jouaient un jour ensemble » (La Fontaine ver 11). Ça ne veut pas dire qu’ils étaient déjà ensemble. Plutôt qu’ils se rencontraient parfois dans la vie et s’entendaient, mais la folie n’était pas assignée à l’amour. Jusqu’au jour où l’amour et la folie se sont disputés et ils sont allés vers les dieux pour recevoir leur conseil. Mais la folie était trop impatiente pour leur conseil et la folie a frappé l’amour si fort qu’il en a perdu la vue. À cause de l’impatience et de la décision irréfléchie de la folie, elle est condamnée à servir de guide à l’amour.

Quand nous regardons les autres moralités de ses fables, il est souvent facile de comprendre ce que la fable essaie de nous apprendre. La Fontaine a tendance à nous apprendre à naviguer les circonstances que nous contentons dans notre vie. Margaret McGowan, dans son article « Moral Intention in the Fables of La Fontaine » (1966), dit que :

. . . he has found new ways of analyzing and expressing commonplaces, ways which not only give us his views of the society of his time, but which make us rethink our moral attitudes, delve into our own experience, and which urge us to modify our behavior and remember in all circumstances what we are. (McGowan 281)

Par exemple dans Le Lion et le Rat, nous trouvons que la moralité de la fable est « Il faut, autant qu’on peut, obliger tout le monde / On a souvent besoin d’un plus petit que soi » (La Fontaine vers 1 à 2). Là, La Fontaine essaie de nous apprendre qu’il faut se rappeler de se respecter et que nous ne pouvons pas être préjugés parce que nous ne savons jamais de qui nous pourrions avoir besoin, ça pourrait être ceux que nous avons jugés. Un autre exemple d’une moralité pour nous guider est dans L’Âne et le petit Chien, « Ne forçons point notre talent / Nous ne ferions rien avec grâce / Jamais un lourdaud, quoiqu’il fasse / Ne saurait passer pour galant (La Fontaine vers 1 à 4). La Fontaine veut nous rappeler qu’il est inutile de prétendre être quelque chose que nous ne sommes pas parce que la vérité le montrera toujours.

Nous avons ces moralités qui nous conseillent sur la façon de naviguer dans notre vie, mais dans L’amour et la Folie, il semble que La Fontaine qu’il nous dit juste que l’amour fonctionne pour être mystérieux, ce qui ne nous enseigne pas une leçon mais ressemble juste à une déclaration sans arrière-pensée. Maintenant non seulement La Fontaine n’a-t-il pas utilisé d’animaux pour cette fable, mais maintenant la moralité ne suit pas son style habituel. De plus, nous ne pouvons pas simplement séparer la moralité de la fable et la comprendre comme avec les deux exemples précédents, nous avons besoin de la fable pour vraiment comprendre ce que La Fontaine nous dit.

En premier lieu, il est facile d’être confus quant à comment la moralité se rapporte à la fable elle-même. C’est parce que vous devez penser hors de la fable. Quand l’amour était tout seul, on peut déduire que l’amour était autrefois pure émotion, sans guide ni influence. L’amour était capable de voir et de choisir ceux à qui il donne de l’amour. Mais maintenant, l’amour est le caprice de son guide, la folie. L’amour est aveugle et ne peut pas sélectionner à qui donner de l’amour. Ceci est la raison pour laquelle l’amour est mystérieux. Au guide de la folie, l’amour ne peut plus choisir avec préjugé, l’amour peut frapper quand on l’attend le moins, au bon moment, au mauvais moment, ou ne jamais apparaître. L’amour est imprévisible, pourquoi et qui frappe avec sa flèche est un mystère.

Des sentiments mystérieux de l’amour peuvent être la seule raison pour lesquelles. La Fontaine utilise les dieux plutôt que des animaux pour raconter cette fable. La Fontaine utilise des animaux parce qu’ils peuvent ressembler à des émotions et à des caractéristiques humaines que nous comprenons. Mais dans L’Amour et la Folie, La Fontaine discute de quelque chose que les humains ont tendance à ne pas comprendre. L’amour fonctionne de manière mystérieuse parce qu’elle est guidée par la folie. Il y a des choses dans notre vie que nous ne pouvons pas changer et les humains ont tendance à essayer de donner un sens à ces choses, où il n’y a aucun sens à avoir. C’est la moralité que La Fontaine essaie de nous enseigner.

L’obsession avec trouver une raison pour l’amour est vu à travers l’histoire. Ce n’est pas un nouveau concept que l’amour et la folie vont de pair et ce n’est pas une surprise que les gens soient obsédés pour trouver une raison pour laquelle. Michal Altbauer-Rudnik a écrit sur cette fascination de l’amour dans son article « Love, Madness and Social Order: Love Melancholy in France and England in the Late Sixteenth and Early Seventeenth Centuries » (2006). Il écrit que :

While the medical description of love melancholy in the late sixteenth and early seventeenth centuries remained faithful to its predecessors, the volume of writings increased dramatically, with such writers as Ferrand or Burton devoting hundreds of pages to its specific aetiology, symptoms, diagnosis, prognosis and, of course, therapy. (Altbauer-Rudnik 36)

Mais, La Fontaine ne suit pas cette idée et donne à la place ses propres opinions. Sous le couvert d’une fable, La Fontaine nous raconte indirectement que notre obsession avec d’essayer de comprendre l’amour est inutile et ce n’est pas l’amour qui nous donnera la folie, c’est notre besoin de comprendre l’amour qui va.

Les humains essaient de tout comprendre et de donner un sens à tout. Nous essayons de comprendre tous les obstacles qui nous donnent des difficultés dans nos vies et les situations que nous rencontrons. Mais peut-être la chose la plus mystérieuse de toutes, les dieux auxquels nous croyons, nous n’essayons pas de leur donner un sens, nous les acceptons simplement et ne les questionnons pas. Nous utilisons même les dieux pour expliquer l’inexplicable. Donc seulement après avoir regardé simplement au-delà des mots et approfondi notre nature humaine que nous comprenons la moralité que La Fontaine nous enseigne. La Fontaine veut que nous apprenions qu’il y a certaines choses dans la vie pour lesquelles nous ne pourrons pas trouver de raison. Notre impatience, comme de La Folie, en essayant de donner un sens à l’amour, ne fera que nous dérangions, et peut-être va-t-il mieux le laisser aux dieux.

 


BIBLIOGRAPHIE

Altbauer-Rudnik, Michal. “Love, Madness and Social Order: Love Melancholy in France and England in the Late Sixteenth and Early Seventeenth Centuries.” Gesnerus, vol. 63, 2006, pp. 33–45., https://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.614.2982&rep=rep1&type=pdf.

Bellosta, Marie-Chrisitne. « La Vie D’Ésope Le Phrygien’ de La Fontaine, Ou Les Ruses De La Vérité. » Revue D’Histoire Littéraire De La France, vol. 79, no. 1, 1979, pp. 3–13. JSTOR, www.jstor.org/stable/40526237. Accessed 21 Nov. 2020.

Ben Rejeb, B., 2000, « Les fables de La Fontaine. Rhétorique de la prédication », Annales de l’ISLT, N° double 4-5, p. 1-36.

La Fontaine, Fables, XII, A Monseigneur le Duc de Bourgogne, p. 345, éd. Livre de Poche.

McGowan, Margaret M. « Moral Intention in the Fables of La Fontaine. » Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, vol. 29, 1966, pp. 264–281. JSTOR, www.jstor.org/stable/750719. Accessed 21 Nov. 2020.

Rim Ben Yacoub. « Analogie et cohérence textuelle. Cas de l’analogie animale dans les Fables de La Fontaine. » Studii Si Cercetari Filologice : Seria Limbi Straine Aplicate, no. 18, Dec. 2019, pp. 170–175. EBSCOhost, search.ebscohost.com/login.aspx?direct=true&db=edsdoj&AN=edsdoj.6327c319c184ce2a355f31482b65d29&site=eds-live&scope=site.

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La littérature française du moyen-âge au XVIIe siècle. Actes de la conférence. Copyright © 2020 by Alexis Greer, Bethany Proctor, Carly Roberts, Gerardo Moreno, Ihsane Ouassari, Isabela Valencia, Roxane Perret, and Wayne Notice is licensed under a Creative Commons Attribution-NonCommercial-NoDerivatives 4.0 International License, except where otherwise noted.

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